Abstract
En développant l’argument selon lequel les mots sont les signes des idées de celui qui parle, Locke semble assigner une origine individuelle à la signification. Pourtant, au début du livre III de l’Essai sur l’entendement humain, il définit le langage comme le lien commun de la société : loin de constituer une simple formule d’introduction, cette définition est illustrée et confirmée tout au long du livre. Le langage constitue un lien commun parce qu’il fixe non seulement les idées mais également les rapports entre idées d’une manière qui détermine l’esprit des hommes et organise leurs représentations. Plutôt que de voir en Locke un penseur de l’intériorité, pour lequel le langage n’est que l’extériorisation par le signe de pensées qui sans les mots resteraient enfermées dans l’esprit de l’homme, il faut envisager le rôle des pratiques et des usages dans la constitution du rapport entre idées. Tout en élaborant une critique de l’imperfection des mots, Locke, à la suite d’Arnauld et Nicole, s’efforce de penser les liens entre logique et vie civile.