Friedrich Nietzsche - Alexis karpouzos

Friedrich Nietzsche 2:4 (2021)
  Copy   BIBTEX

Abstract

Nietzsche pousse tout au long de son oeuvre un cri contre la paresse, la médiocrité, le confort, la sécurité de l’acquis, et invite à se risquer à chaque instant dans le contact nu avec la vie — au risque de s’y brûler. Toute réticence pour lui est négation de la vie. Sauter dans le feu, pour devenir dieu ou mourir. — Il en est mort... Pourtant lorqu’on lit ses mots, n’a-t-on pas l’impression qu’il était tout prêt de déchirer le voile? «J’ai découvert pour moi que la vieille humanité, la vieille animalité, oui même tous les temps primitifs et le passé de toute existence sensible, continuent à vivre en moi, à écrire, à aimer, à haïr, à conclure, – je me suis réveillé soudain au milieu de ce rêve, mais seulement pour avoir conscience que je rêvais tout à l’heure et qu’il faut que je continue à rêver, pour ne pas périr: tout comme il faut que le somnambule continue à rêver pour ne pas tomber. Q’est désormais pour moi l’“apparence”? Ce n’est certainement pas l’opposé d’un “être” quelconque – que puis-je énoncer de cet être, si ce n’est les attributs de son apparence? Ce n’est certes pas un masque inanimé que l’on pourrait mettre, et peut-être même enlever, à un X inconnu! L’apparence est pour moi la vie et l’action elle-même qui, dans son ironie de soi-même, va jusqu’à me faire sentir qu’il y a là apparence et feu follet et danse des elfes et rien de plus – que, parmi ces rêveurs, moi aussi, moi “qui cherche la connaissance”, je danse le pas de tout le monde, que le “connaissant” est un moyen pour prolonger la danse terrestre, et qu’en raison de cela il fait partie de ces maîtres de cérémonie de la vie et que la sublime conséquence et le lien de toutes les connaissances sont et seront peut-être le moyen suprême d’assurer l’universalité de la rêverie et l’entente de tous ces rêveurs entre eux et, par cela même, de faire durer le rêve.» Ibid, par. 54. N'est-ce pas dire, avec des mots sortis du fond des tripes, qu'il a découvert que la vie n'est qu'un jeu qui se joue de toute conscience qui s'illusionne "être", mais qu'il a pourtant décidé d'adhérer à ce jeu, parce que s'en détacher, ce serait retomber sous le charme d'une nouvelle illusion, l'illusion de se croire "être" celui qui aurait percé le jeu à jour, alors qu'y adhérer, tout en le perçant à jour, c'est enfin être vivant? Incandescence Nietzsche a mis dans sa recherche une intensité hors du commun. Et une honnêteté totale aussi. Lorsqu'on apporte une telle intensité et une telle honnêteté, on amène nécessairement son propre être à son point d'incandescence. Ce point d'incandescence, c'est la porte du néant. Mais selon que l'on s'agrippe alors à soi ou que l'on s'abandonne à ce qui vient, on bascule dans la lumière de l'éveil ou dans l'angoisse de sa propre solitude. Nietzsche a fait face au néant, mais autant que j'en aie compris, il ne s'est pas abandonné; il a au contraire adopté la position héroïque de celui qui tient bon, qui fait face et campe sur sa propre force. Cette position met en jeu des force intérieures considérables, qui donnent une clarté puissante à la conscience, mais qui oblige du même coup celle-ci à se supporter elle-même, à bouts de bras, sans possibilité de lâcher, sous peine de s'écrouler. Cette intensité reposant entièrement sur soi donne un sentiment de vertige, et si on insiste dans cette voie, on peut vraiment avoir l'impression de devenir fou. Car on se retrouve écartelé entre deux choix également impossibles: la surenchère infinie de sa propre puissance et l'anéantissement. Il me semble que Nietzsche a été extrêmement loin dans cette voie, jusqu'à ce que le fil casse. Dans ce sens – je le répète, ce n'est là que ma compréhension des choses – je partage l'avis de Jean-Marie et mushotoku-nad, en disant que Nietzsche n'aurait pas connu l'éveil tel qu'on l'entend ici. Il est resté sur le pas de la porte, refusant farouchement le lâcher-prise salvateur – qu'il aurait pris pour un aveu de faiblesse –, refusant de dire ces mots: "Que Ta volonté soit faite!", les mots par lesquels tout se trouve accompli, persistant au contraire à braver la tempête plutôt que d'accorder à Cela toute-puissance sur lui-même. Eternel retour Lorsqu’on vit un moment d’une totale intensité, on sent bien qu’on touche l’essence de l’être. A partir d’une certaine intensité, on débouche sur quelque chose de substantiel, quelque chose qui EST, et donc qui nécessairement dépasse le petit moi. Simplement, dans un cas comme celui-ci, on reste convaincu qu’il s’agit d’un état d’exception. On a touché l’éveil, la réalité de l’être, mais on n’y est pas entré. Y entrer, c’est réaliser que ce moment que l’on vit comme un état d’exception a en fait toujours été là, que ce n’est véritablement pas un moment d’exception, mais notre vraie nature, la nature de ce qui EST, et que l’état d’exception c’est celui d’en être séparé parce qu’on s’identifie à une illusion. Tant qu’on n’a pas réalisé cela, on croira nécessairement que les seuls instants vrais de notre vie sont ces instants d’exception durant lesquels on communie à l’être, et que tout le reste est sans valeur. C’est dans ce sens que je comprends la théorie de l’éternel retour de Nietzsche, qui pour moi a toujours eu un caractère angoissant. Revivre éternellement le retour du même. Ou plus précisément, car c’est cela qu’entendait Nietzsche, revivre éternellement le retour de ces moments d’exception, ces seuls moments réels. Car du moment qu’on pense qu’eux seuls sont réels, qu’eux seuls sont enracinés dans l’être éternel, l’évidence s’impose que d’une part ils ne sauraient disparaître, et que d’autre part tout le reste ne saurait avoir d'existence réelle. Et donc que l'éternité est faite de ces moments d'exceptions, qu'elle est faite de l'éternel retour de ceux-ci.

Links

PhilArchive



    Upload a copy of this work     Papers currently archived: 93,745

External links

  • This entry has no external links. Add one.
Setup an account with your affiliations in order to access resources via your University's proxy server

Through your library

Similar books and articles

Over den oorsprong Van het woord.J. A. J. Peters - 1951 - Tijdschrift Voor Filosofie 13 (2):163-208.
Zijn en absoluutheid.L. De Raeymaeker - 1958 - Tijdschrift Voor Filosofie 20 (2):179-212.
Phaenomenologie Van de vrijheid.W. Luijpen - 1958 - Tijdschrift Voor Filosofie 20 (4):601-645.
De keuze Van Hippolyte.F. J. J. Buytendijk - 1950 - Tijdschrift Voor Filosofie 12 (1):3-58.
De filosofie Van het spel en het spel Van de filosofie.M. G. Plattel - 1967 - Tijdschrift Voor Filosofie 29 (2):262 - 305.
De betekenis Van het lichaam in een thomistische antropologie.N. Luyten - 1963 - Tijdschrift Voor Filosofie 25 (1):3 - 36.
Het christelijk scheppingsbegrip en de antieke wijsbegeerte.C. J. De Vogel - 1953 - Tijdschrift Voor Filosofie 15 (3):409-425.

Analytics

Added to PP
2022-10-02

Downloads
0

6 months
0

Historical graph of downloads

Sorry, there are not enough data points to plot this chart.
How can I increase my downloads?

Author's Profile

Alexis Karpouzos
International Philosophy Center In Athens

Citations of this work

No citations found.

Add more citations

References found in this work

No references found.

Add more references