Abstract
L'idée de Dieu, telle qu'elle se présente aujourd'hui, doit être comprise à partir de Spinoza. Pour celui-ci Dieu n'est plus qu'une condition nécessaire de possibilité générale de tout ce qui existe. Comme R. Boehm a remarqué, Dieu n'est pas la raison suffisante par laquelle les res particulares existent. Ceci oblige à une prise de position de la part de la théologie moderne. Hartshorne semble avoir pressenti le problème bien que son interprétation de Spinoza soit douteuse. Pour lui, Dieu est nécessaire au monde, mais le monde aussi doit, sous un certain rapport, être nécessaire à Dieu. Cepedant la nécessité du monde (vis à vis de Dieu) ne peut pas nuire à la contingence du monde (à la liberté de l'homme par exemple). C'est pourquoi Hartshorne distingue un monde en tant que tel, d'un monde contingent. Le monde en tant que tel est identique à Dieu. Il s'agit de l'idée de cause. Pour Hartshorne une révision de cette idée est souhaitable. Ce qui reste étrange pourtant, c'est qu'il continue à penser une cause comme une condition nécessaire de possibilité (précisément comme Spinoza). Et Dieu comme cause (identique au monde en tant que tel) se rapporte toujours aux res particulares, comme la Substance de Spinoza à une raison suffisante. L'essai de Hartshorne qui consiste à restreindre les choses particulières, à les tenir à l'intérieur de leur être en tant que tel ou de leur classe, se révèle alors comme impossible, précisément parce que l'être en tant que tel (égal à Dieu) n'est qu'une condition nécessaire, et qu'on ne peut déduire une raison suffisante d'une condition nécessaire. C'est plutôt le contraire qui est possible : la déduction de conditions nécessaires d'une raison suffisante. Hartshorne ne peut pas et ne veut pas faire droit aux choses particulières. En dépit de ses assertions de vouloir les respecter en ce qu'elles sont de spécifiques, Hartshorne doit continuer à penser les choses particulières à partir de leurs conditions de possibilité