Abstract
Les fictions sont un outil privilégié de l’éthique du fait de la matière à la fois singulière et universelle qu’elles fournissent, qui permet de se prémunir contre les écueils opposés du trop-plein d’abstraction et d’implication. Ainsi, à la lumière du débat entre déontologisme et conséquentialisme tel qu’il est exploré dans la série 24 heures chrono (Fox, 2001-2010) via notamment son héros Jack Bauer, je propose une relecture croisée de deux textes fondamentaux de la tradition occidentale : l’opuscule de Kant « D’un prétendu droit de mentir par humanité » et la tragédie Œdipe roi de Sophocle. Si ces œuvres peuvent sembler d’abord hétérogènes, tant dans leur nature (une série états-unienne du XXI e siècle, le texte d’un philosophe allemand du XVIII e siècle, une tragédie de l’Antiquité grecque) que dans leur niveau de reconnaissance philosophique, elles convergent en fait toutes trois vers une question morale clé : quel rôle doit être accordé à l’anticipation des conséquences dans nos décisions morales?