Larvatus pro Deo: Phénoménologie et théologie chez J.-L. Marion
Abstract
«Au moment de monter sur ce théâtre du monde [...], j'avance masqué». Cette déclaration de Descartes dans le Préambule des Cogitationes Privatae n'est pas que l'aveu d'un jeune philosophe à l'aube du XVIIe siècle, mais marque une stratégie maintenant séculaire selon laquelle philosophie et théologie devraient être séparées tant dans leurs disciplines que dans leur corpus. Jean-Luc Marion, témoin exemplaire de cette dichotomie, use ainsi de la démarche dionysienne de l'homme caché devant Dieu comme justification théologique de l'avance masquée du philosophe . Le gain unilatéral pour la philosophie est cependant une perte pour la théologie. À partir de la double hypothèse bonaventurienne du «Dieu proche» et de la «monadologie trinitaire», cet article trace une autre voie pour notre aujourd'hui - non pas contraire à la précédente, mais la poussant en quelque sorte «à son terme», ne craignant pas cette fois de revendiquer la fécondité explicite de la phénoménologie pour la théologie elle-même: non larvatus sed détecta fonte prodeo - j'avance non pas voilé mais à visage découvert