Abstract
Popper cite Bergson dès ses premiers écrits, dans les années 1930, en s'appuyant sur l'idée d' « intuition créatrice », contre l'inductivisme et le positivisme, mais sans accorder quelque infaillibilité que ce soit à l'intuition. Il lui emprunte ensuite les termes de « société ouverte / société close », en leur donnant un sens rationaliste, et en critiquant fortement le mysticisme et le vitalisme « historiciste » et même « hégélien » du philosophe français. À partir des années 1960, il donne un tour evolutionniste à son épistémologie, et est amené à réhabiliter l'idée d'évolution créatrice, en référence constante à Bergson, dont il cherche à montrer qu'une vision « activiste » de l'évolution néodarwinienne permet de simuler Y élan vital sans le supposer. Il propose une cosmologie de l'avenir ouvert, affirmant la réalité du temps et de sa direction, pour permettre de penser l'émergence et la liberté créatrice de nouveauté, ce qui le rapproche encore de Bergson, mais sans spiritualisme ni arrière-plan religieux. Il a toujours admiré la clarté du style de Bergson. In the thirties, Popper used Bergson's idea of a « creative intuition », against inductivism and positivism. But he denied it any infallibility. In the forties, he borrowed from Bergson the expressions « société ouverte I société close », but gave them a rationalist interpretation, criticizing fiercely Bergson's mysticism, as well as his vitalism, regarded as an essentialist historicism à la Hegel. But eventually in the sixties Popper gave his epistemology an evolutionary turn, somewhat rehabilitating the Bergsonian idea of a « creative evolution » and even the idea of an « élan vital ». He argued that an « activist » understanding of Darwinian mechanisms was able to simulate the latter idea, without presupposing it. He proposed a cosmology of the « Open Universe », stressing the reality and irreversibility of time. He went on to use the concept of emergence and tried to give an account of man's freedom, regarded as a power to create genuine novelty in the world, as Bergson had proposed. But Popper eliminated all substantialist spiritualism, and he gave no religious background to his vision of the world. It may be added that he confessed his admiration for the lucidity of Bergson's writing