Abstract
Wittgenstein hérite de Frege l’idée d’une égalité de statut entre affirmation et négation, mais au lieu d’en tirer la thèse d’une absence de force de la négation, il en restaure au contraire la force alors même qu’il ne lui correspond aucune objectivité. D’où vient cette force? Cette force serait d’expression. Dans cet article, je montre que Wittgenstein n’est finalement pas intéressé par la question sémantique de la négation, mais plutôt par cette attitude propre au philosophe consistant à ne pas faire cas de son symbolisme opératoire, ce qui l’entraîne indûment à s’interroger sur son essence cachée. S’agissant du cas de la négation, Wittgenstein montre comment s’attaquer à la source de notre errement plutôt qu’à la source de la signification justifiant son usage. Il « traite » ainsi ce qu’il appelle dans une de ses Dictées le « problème de Socrate ». L’impasse sur le symbolisme de la négation est un symptôme d’aveuglement au symbolisme. Reste donc à saisir l’articulation du signe avec le symptôme, soit entre deux espèces de traits que Wittgenstein tient pour hétérogènes. Pourtant, dans son combat contre les préjugés grammaticaux, Wittgenstein entend bien redonner à l’expression du signe une importance qui permet de comprendre en même temps son action sur le symptôme (sa disparition). Dans la « résolution », une certaine concomitance freudienne entre les deux est donc présupposée. Nous examinons ce point de rencontre avec Freud tout en distinguant leurs conceptions respectives du grammatical.