Abstract
La Critique de la faculté de juger esthétique reçoit dans la lecture cousinienne, si déterminante pour la philosophie française du XIXe siècle, une place ambivalente. Cousin s’appuie sur les analyses de Kant pour établir solidement l’universalité et l’autonomie du jugement du beau, mais semble évacuer ensuite l’ensemble de ces analyses pour proposer in fine une philosophie du beau qui se situe fermement dans la tradition néoplatonicienne. Si Cousin (et un certain nombre de philosophes qui s’inscrivent dans son sillage) se contente de prélever certains arguments ou certains motifs qui l’intéressent dans le texte kantien, sans tenir compte de l’ensemble du dispositif mis en place par Kant, cela tient non seulement aux conditions de sa réception, mais encore au fait que Cousin « lit » la Critique de la faculté de juger comme une théorie du beau. Le principal défaut de l’ouvrage kantien, dès lors, est de nier l’existence objective de ce qui, dans cette perspective, aurait dû constituer le sujet et le centre du livre, à savoir le beau.