La Théorie critique, entre reconnaissance et mésentente
Abstract
Axel Honneth, célèbre théoricien allemand de la reconnaissance qui s’inscrit dans la filiation de l’École de Francfort et notamment de Jürgen Habermas, et Jacques Rancière, éminent penseur français de la mésentente qui a rompu avec la tradition althussérienne, sont deux figures centrales du paysage intellectuel contemporain. Leurs pensées se situent dans deux traditions distinctes, mais elles ont toutes deux à voir avec le marxisme pris au sens large, qu’elles considèrent sous un angle critique. Les deux penseurs portent intérêt à des domaines spécifiques au sein de la philosophie et hors d’elle. S’ils partagent tous deux un souci du domaine politique, Axel Honneth se meut dans la philosophie sociale, la philosophie morale et la philosophie du droit ; il fait un usage important et réfléchi des sciences sociales. Jacques Rancière se tourne, pour sa part, vers l’histoire, l’esthétique et la littérature. Mais une confrontation entre leurs deux pensées paraît s’imposer, tant leurs modèles sont influents dans le
champ des sciences sociales, de la théorie politique et de la philosophie critique aujourd’hui. Il s’agit de savoir si les paradigmes qu’ils mettent en avant pour critiquer la société, pour rendre raison de son évolution et des transformations qui doivent la rendre plus juste ou plus libre, le paradigme
de la reconnaissance et celui de la mésentente, sont concurrents, s’ils sont exclusifs l’un de l’autre, ou s’ils sont compatibles.