Abstract
Le solidarisme de Léon Bourgeois constitue une tentative convaincante de surmonter l’opposition traditionnelle entre libertés individuelles et justice sociale. Bourgeois tente de relever ce défi en faisant appel aux nouvelles découvertes scientifiques en sociologie comme en biologie. En bref, l’observation de la nature nous montrerait que les humains sont en rapport de solidarité les uns avec les autres. De ce fait, on pourrait tirer un devoir de solidarité que l’État serait à même d’imposer aux individus. Fonder une théorie politique sur des théories scientifiques présente un double risque : d’une part, subir l’influence des biologistes collectivistes et de leur vision organiciste de la société ; d’autre part et surtout, se rendre coupable du sophisme naturaliste. Nous exposerons comment Bourgeois tombe initialement dans le piège du sophisme naturaliste avant de s’en extirper. Entre son texte Solidarité (1987) et son Essai d’une philosophie de la solidarité (1907), la progression est frappante. Au final, donc, Bourgeois nous semble présenter une théorie politique qui, tout en s’inspirant des sciences, ne s’y assujettit pas.