Abstract
La priorité que la phénoménologie classique accorde à la première personne se voit déplacée de différentes manières par les penseurs post-phénoménologiques, dont Jacques Derrida. L’article a pour but d’indiquer la fonction stratégique qu’occupe dans la pensée derridienne la figure du témoin, que ce soit en tant que tiers qui déstabilise la métaphysique de la présence dans ses premiers écrits mais surtout, comme figure spéculative dans l’œuvre tardive, entre foi et savoir. Des remarques dispersées de Derrida sur le témoignage, on peut dégager une petite grammaire du témoignage, avec ses trois paradoxes constitutifs: la substituabilité de l’insubstituable, la fondation de l’infondable, la répétition de l’irrépétible. En faisant apparaître la logique constitutive du témoignage, Derrida indique comment la figure du témoin en appelle à une complication de la phénoménologie, qu’on peut résumer par la notion de remédiation.