Abstract
Le livre Émile reste, aujourd’hui encore, une référence majeure et originale dans la pensée de l’éducation : pour Jean-Jacques Rousseau, en effet, la tâche éducative ne peut être conduite sans les exigences conjointes et paradoxales de la nature et de la liberté. Ces deux notions peuvent-elles cependant être vraiment intelligibles indépendamment de la question de la transmission qui sous-tend toute éducation? Comment transmettre authentiquement et durablement? — C’est, croyons-nous, à partir de cette question que l’ Émile cesse d’apparaître comme un manifeste éducatif ou une fiction pédagogique pour se révéler de part en part – livre V inclus – un important ouvrage de philosophie. C’est que la question des pouvoirs de la parole interroge le rapport incertain des mots et des livres au réel, comme si, parce que les mots prolifèrent, les choses échappaient toujours spontanément à l’élève ainsi qu’à son gouverneur. En dépit des errements et des dangers du langage humain, peut-on concevoir un type de parole et de culture capable de former un homme accompli?