Abstract
À partir de l’observatoire d’une « consultation antialcoolique » ouverte en 1954 dans le 13e arrondissement de Paris, cet article étudie la manière dont le travail social a investi le nouveau champ d’action du suivi psychiatrique de l’alcoolisme, dans un contexte de mutations de la prise en charge médicale de cette maladie. Le contenu autant que la structure des dossiers de patients de la consultation, que nous mettons en regard avec des publications issues de revues médicales et de travail social, permettent d’approcher le travail quotidien des assistantes sociales, au plus près des alcooliques et de leurs familles. Nous montrons que l’action de l’assistante sociale, devenue centrale bien que subordonnée à celle du médecin psychiatre, s’enrichit d’une dimension psychothérapique et se caractérise par la recherche de la confiance du malade et de son adhésion au traitement, marquant ainsi une inflexion nette dans le rapport aux populations assistées. Cependant, ces évolutions ne suffisent pas à débarrasser le travail social de ses ambiguïtés constitutives et notamment de ses fonctions de contrôle et de surveillance, sources de difficultés, de malentendus et de conflits avec les malades et leurs proches.