Abstract
Cet article démontre que le spectre d’une « intermédialité » ou d’une « transversalité » esthétique entre les arts verbaux et les arts « silencieux » est la source d’une angoisse profonde et la cause d’une polémique tenace dans la poétique gréco-romaine. À la ressemblance du discours aux arts « spatiaux » est attribuée continûment la corruption de vérité référentielle dans la littérature. Néanmoins, comme les interventions canoniques sur la question du visuel de Plutarque, Démétrios et Quintilien dans la littérature le révèleront, ce rejet témoigne d’une inquiétude déplacée. Dans la capacité d’assouvir le monde temporel à l’œil de l’esprit au moyen de l’artifice, les arts spatiaux forment le miroir où le poétique reconnaît et refoule l’inventivité ontologique au cœur de la discursivité. Le fait que le dix-neuvième siècle marque la fin de la polémique classique contre la transversalité esthétique n’est pas contingent : la modernité esthétique est déterminée non seulement par une conciliation entre les arts mais également par une prise de possession consciente du potentiel ontologique du discours.