Abstract
Si le hasard est, dès 1913, un acteur à part entière de la production de Duchamp, il semble difficile d’en parler de manière générale, indépendamment des mécaniques ingénieuses inventées par l’auteur pour le « mettre en conserve ». Car le hasard, loin d’être un symbole de la chance ou de l’irrationnel, est avant tout une opération de pensée, qui se réinvente dans chaque œuvre à travers des méthodes différentes. Ainsi l’ Erratum musical permet-il de questionner la notion d’empreinte mémorielle, les formes aléatoires des 3 stoppages étalon érodent la norme du mètre par excès de précision, et l’ Obligation pour la roulette de Monte-Carlo transforme la martingale en jeu de patience. En portant une attention précise aux opérations de hasard spécifiques à chaque œuvre ainsi qu’aux mouvements de pensée qui les accompagnent, nous verrons comment ces objets se font écho en élaborant, chacun à leur manière, une esthétique suspensive.