Abstract
Cet article examine l’interprétation athée de la doctrine de l’esprit de Descartes que More propose dans ses écrits tardifs, en particulier dans l’ Enchiridion Metaphysicum de 1671 et dans des remarques éparses dans ses scholies de 1679. More n’a pas toujours pensé que la philosophie de Descartes conduisait à l’athéisme. Cependant, je suggère qu’à l’époque où il rédigeait l’ Enchiridion, il était convaincu que le cartésianisme impliquait l’athéisme au sens fort où il impliquait l’impossibilité de Dieu. Je présente les principales raisons de More à l’appui de sa lecture athée et me tourne dans une seconde partie vers son principal problème à l’égard de la doctrine de l’esprit de Descartes – ce qu’il nomme « nullibisme ». La critique du nullibisme par More est implicite dès la correspondance avec Descartes (1648-1649), mais c’est seulement dans les œuvres ultérieures et en particulier dans l’ Enchiridion qu’elle est principalement développée. J’essaie de montrer que le problème avec le nullibisme se réduit au problème avec l’autre doctrine de l’esprit inacceptable aux yeux de More – le « holenmérisme » scolastique – et que sa reductio ad atheismum de la philosophie de Descartes repose au fond sur sa façon de comprendre le holenmérisme. Or je suggère que celle-ci n’est pas charitable. À l’inverse, la doctrine de l’esprit qu’il défend – l’étendue spirituelle – échoue à surmonter les difficultés que le nullibisme et le holenmérisme cherchent, chacune de leur manière, à résoudre.