Clio 26:145-154 (
2007)
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Abstract
Corps rebelles. Les tatouages de la collection Lacassagne (1874-1924). À la fin du XIXe siècle, le Docteur Alexandre Lacassagne est médecin militaire en poste en Algérie, auprès des bataillons d’Afrique, ces compagnies disciplinaires où sont envoyés les soldats indisciplinés, aux confins de l’empire colonial français. Dans cette relégation à « régime spécial » où les conditions d’existence sont infernales, le jeune médecin entreprend de relever les marques corporelles dont s’ornent les soldats. Décalquant leurs tatouages à même leur peau pour en faire une étrange collection et tenter d’en comprendre les enjeux et les significations, il s’interroge : pourquoi une telle conduite? C’est la question que nous posons de nouveau dans cet article qui porte plus particulièrement sur les figures féminines ainsi tatouées et sur le rôle que joue cette pratique de « sauvages » dans l’espace clos du bataillon disciplinaire. Réaffirmation d’une virilité outrée dans un espace monosexué, essai identificatoire qui sonne comme un pied de nez à l’institution qui veut contraindre les corps, le tatouage est une pratique performative complexe, à la fois paradigme de la masculinité et de la marginalité.