Abstract
Cet article se penche sur les rapports entre les politiques de réparation et la perception du temps après un crime de masse. Il cherche à démontrer que les mesures réparatrices prises parfois dans le but de rétablir la justice et le dialogue entre les groupes agissent sur la perception du temps. Elles sont dotées d’un pouvoir de reformulation qui vient modifier la mise en récit du passé, et donc sa perception. Elles contribuent notamment à faire le récit des responsabilités et celui de la souffrance des victimes.Pour le montrer, l’article s’appuie sur un cas, celui des réparations ouest-allemandes destinées à Israël et à la Claims Conference entre 1945 et 1980. Cette période relativement longue permet d’observer un changement dans les modes de réparation : la RFA eut d’abord recours au droit civil, puis au droit pénal, et enfin aux symboles. Chacun de ces modes reformula à sa manière l’histoire des crimes et changea par conséquent la perception du passé qui ne cessa d’évoluer au fil du temps, en intégrant au fur et à mesure davantage le point de vue de la victime