Abstract
En partant de l’observation de patients ayant subi une transplantation hépatique, nous constatons que la réhabilitation est souvent très laborieuse. Le malade se trouve transformé par l’intervention des autres sur lui-même. Pour se réapproprier ce corps, il est nécessaire de redonner un sens propre à ce qui s’est passé, loin des explications techniques qui ont permis aux soignants d’agir. Ces explications ne lui permettent pas de comprendre. La dialectique du comprendre et de l’expliquer est difficile à saisir pour le soignant qui privilégie les explications, alors qu’à cette phase du soin elles sont étranges pour le malade. Pour comprendre il lui est plus simple de recréer sa propre tragédie, avec ses propres rôles, un début et une fin. Ses particularités, son ipséité réapparaissent et il peut dresser le bilan de ce qu’il a subi. Il s’agit de sa première action, un « agir narratif ». S’acceptant tel qu’il est devenu, il peut dès lors se considérer comme un nouvel individu, un être guéri non par décret médical, mais par sa propre action. Pour que ce récit soit accueilli, il est nécessaire que le soignant lui face hospitalité et acte de reconnaissance. C’est l’enjeu éthique de cette réflexion : le soignant qui permet, par l’écoute, une autre écriture.