Abstract
On a souvent considéré que la partie la plus importante de l’œuvre de Derrida résidait dans les cinq livres publiés entre 1967 et 1972. On se propose ici, à travers une relecture du texte le plus décisif de cette période, La Voix et le phénomène, de mettre en lumière la manière propre à Derrida d’unir la question de la disruption de la présence à celle de l’écriture. Ce qui est par conséquent interrogé est l’accent mis par Derrida sur la mort, considérée comme la condition même de possibilité du langage et de l’écriture. Comme Derrida le montre à bon droit, Husserl, en dépit de l’importance qu’il confère à l’écriture dans le processus d’idéalisation, n’a pas pris conscience du fait que le rapport à la mort constitue la structure concrète du présent vivant. Mais, d’un autre côté, en opposant d’une manière trop dualiste la présence et l’absence, la vie et la mort, Derrida ne s’est pas lui-même montré capable de voir que la condition du langage n’est pas tant la mort du sujet que l’être-pour-la-mort et la finitude du Dasein.