Abstract
En dépit de son importance, tant dans la théorie générale des crises que dans la conscience populaire, la notion « d’armée de réserve » a suscité peu de discussion théorique au sein du marxisme. Cet article propose de rassembler les contributions éparses qui la mobilisent pour identifier les usages de cette notion, et son apport au-delà des notions de chômage ou d’inoccupation. Si elle s’inscrit, à l’origine, dans un débat sur l’approche économique ou démographique des questions de population, la notion d’« armée de réserve » est employée avec quatre objectifs distincts dans la littérature marxiste. En premier lieu, elle sert d’opérateur historique, pour identifier les spécificités de chaque séquence capitaliste (et non-capitaliste). En second lieu, elle définit l’exercice d’un pouvoir d’État. En troisième lieu, elle joue le rôle d’opérateur synchronique, pour circonscrire les rapports de pouvoir à l’œuvre sur chaque territoire à une même époque. En dernier lieu, elle constitue un opérateur partisan, susceptible d’aider la constitution d’un sujet politique révolutionnaire.