Peu d'oeuvres souffrent autant que celles de Rousseau et Sartre de la réputation qui leur est faite. Prix de leur accessibilité peut-être, de l'ampleur des controverses auxquelles elles ont donné lieu, elles sem-blent irrémédiablement marquées l'une et l'autre par quelques formules censées en résumer la substance: errant seul dans les bois, Rousseau serait le champion d'un homme sauvage et bon qu'il opposerait à toutes les manifestations de la vie sociale; assis seul dans les cafés, Sartre affirmerait, de son côté, l'échec (...) douloureux de tout rapport interpersonnel—et leurs oeuvres réspectives developperaient cette position centrale. Simplifications sans doute. Malgré tout, il n'est peut-être pas inutile d'interroger le fait qu'on ait surtout retenucelad'oeuvres si riches, particulièrement en regard de leurs nombreux textes politiques, en tentant d'envisager ces oeuvres moins à travers l'une ou l'autre de leurs théses que selon des lignes de force plus génerales sur ce problème de l'existence sociale. Ceci peut permettre, croyons-nous, quelques mises en rapport suggestives. (shrink)
Le caractère complexe de la notion d'« opinion » chez Rousseau, qui est à la fois une soumission à l'estime des autres et un levier indispensable pour toute réforme des moeurs, est la base d'une discussion des enjeux de l'action qu'il prône sur les coeurs des hommes : d'abord par l'évocation de quelques thèmes de la Lettre à d'Alembert qui tente de définir les difficultés de cet « art » ; ensuite au niveau de l'action positive des grands réformateurs : (...) le Législateur, le gouverneur d'Emile et surtout Wolmar dont l'échec dans La Nouvelle Héloïse jette un éclairage décisif sur l'ensemble de la démarche éthique de Rousseau.The complex character of «opinion» in the works of Rousseau, which is both a submission to the judgment of others and an indispensable leverage for the reform of morals, is the basis for a discussion of his action on the hearts of men : first through some of the themes of the Lettre à d'Alembert which attempts to define the difficulties of such an « art » ; then through the action of the great reformers : the Legislator, Emile's governor and especially Wolmar, whose failure in La Nouvelle Heloïse sheds an important light on the whole of Rousseau's ethical endeavour. (shrink)
Ce texte esquisse deux voies possibles pour un dialogue entre Sartre et Foucault : la lecture des ambivalences de la pensée sartrienne sur le sujet, la morale, la politique, à travers la caractérisation de l'épistémè moderne dans Les mots et les choses ; et, inversement, l'approche critique de la conception foucaldienne du savoir et du pouvoir à partir de l'anthropologie de la Critique de la raison dialectique.This paper suggests two possible directions for a dialogue between Sartre and Foucault : a (...) reading of the Sartrean ambivalences on the subject, morality and politics in the light of the characterization of the modern épistémè in The Order of Things ; and, inversely, a critical approach of the Foucaldian conception of power and knowledge through the anthropology of the Critique of Dialectical Reason. (shrink)
Ce texte propose une lecture de l'oeuvre de Montesquieu à partir de débats récents sur le relativisme politique. La méthode d'ensemble qui se dégage de quelques grands thèmes des Lettres persanes et de L'Esprit des lois permet d'apercevoir le double enseignement de cette pensée: qu'elle est structurée à la fois par un horizon normatif d'universalité et par une conception plurielle du bien politique.This paper proposes a reading of Montesquieu's work on the basis of recent debates concerning political relativism. The overall (...) method which is present in some of the major themes of the Lettres persanes and De l'Esprit des lois suggests that this thought is structured at once by a normative horizon of universality and by a plural conception of the political good. (shrink)
À partir d'une condition humaine définie en termes d'échec et de conscience malheureuse, la « mauvaise foi » chez Sartre et les « stades de l'existence » chez Kierkegaard ouvrent sur une quête d'authenticité qui est une tâche permanente pour l'homme, qui requiert de lui une « conversion » qui est toujours à refaire. Une esthétique du jeu correspond au niveau symbolique aux exigences de cette recherche, mais c'est l'ironie qui semble le plus à même d'assumer les paradoxes de l'éthique (...) recherchée et ceux du discours philosophique qui prétend en rendre compte.Having defined the human condition in terms of failure and unhappy consciousness, Sartre's "bad faith" and Kierkegaard's "stages of life" introduce a quest for authenticity which is a permanent task for man and requires a "conversion" which must be constantly reaffirmed. An aestheticism of play corresponds to the form of this quest on a symbolic level, but it is irony which seems to best express the paradoxes of such an ethic, as well as those of the philosophical discourse attempting to capture it. (shrink)