Abstract
Le droit du travail est confronté à une entreprise dont le dessein a été initialement fixé par d'autres que lui. S'il le perçoit comme un frein à son épanouissement, il s'attachera à le briser pour imposer son propre schéma. N'hésitant pas à ignorer ou neutraliser les frontières tracées par le droit des sociétés, il privilégie une conception souple de l'entreprise, à la recherche de l'essentiel : une activité économique, une communauté d'hommes. Mais de cette entité, il entend imposer une organisation qui, au service de l'objectif de participation, risque d'être source de rigidités perçues comme autant d'obstacles à sa gestion. Cependant, après avoir été d'abord un "droit du salarié", le droit du travail français tend à devenir aujourd'hui un "droit de l'entreprise" prenant en compte, sans renier ses préoccupations premières, les préoccupations et exigences de celle-ci qu'elles intéressent ses modes de gestion ou d'organisation. Il est vrai que l'entreprise dispose de moyens de pression qui lui permettent d'obtenir satisfaction de ses revendications, singulièrement dans un pays où les chômeurs se comptent par millions : la menace de procéder à des suppressions massives d'emplois par accélération des processus d'automatisation ou de délocalisation ne saurait être prise à la légère. Sans compter qu'en un temps où disparaissent peu à peu les formes d'activité industrielle utilisatrices d'un nombre élevé de travailleurs, une entreprise peut fonctionner sans salarié alors qu'un salarié sans entreprise n'est guère concevable