L'Unité die l'Organisme du Point de vue philosophique

Revista Portuguesa de Filosofia 25 (3/4):223 - 233 (1969)
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Abstract

Un des problèmes les plus controversés en bioiogie philosophique, c'est l'unité de l'être vivant. Cette unité est tout à fait sui generis. En effet, nous nen trouvons aucun analogon dans la Nature inorganique. L'unite de l'eau, par exemple, c'est sa molécule dont nous connaissons bien la formule essentielle (H₂O). L'eau contenue dans un récipient, c'est une foule d'individus. Au contraire, l'être vivant, malgré le nombre immense de molécules dont il se compose, constitue un être parfaitement un. La preuve? C'est l'unité de ses activités. Elles tendent toutes au bien de l'être vivant. Mais comment une multitude énorme de molécules, dans l'être vivant, peut-elle conspirer ainsi pour assurer un résultat favorable à l'individu vivant? Comment se fait-il que ces molécules puissent garder si scrupuleusement l'ordre de succession et de subordination dans leurs interventions particulières? Les Psychovitalistes (et il y en a encore de nos jours) disent que tous les êtres vivants possèdent, au moins à quelque degré, la conscience. Cet anthropomorphisme ne trouve aucune sympathie chez les biologistes sérieux. II a déjà été refuté par Aristote. Certains autres biologistes croient pouvoir résoudre le probleme en question en réunissant les forces physico-chimiques dans une "machine". Cette théorie a quelque chose de vrai. L'organisme possède toujours quelque structure. Or la structure rappelle, par plus d'un point, une machine. Cependant outre les ressemblances qui existent entre la machine et Torganisme vivant, il y a entre eux de différences nombreuses et profondes. Ce point a été bien saisi par les Vitalistes. Aussi ont-ils mis dans chaque organisme une "force" spéciale, irréductible aux forces physico-chimiques ("vis vitalis"). Malheureusement, la manière dont ils présentent sa nature compromet gravement leur thèorie au point de la rendre absolument inacceptable. Considérant les difficultés que le mécanicisme et le vitalisme soulèvent sans pouvoir les résoudre, certains biologues ont eu l'idée de présenter une théorie qui serait capable de surmonter "le dualisme mecanicisme-vitalisme" : elle reconnaitrait la pleine validité des lois physico-chimiques dans l'ordre de la vie, mais en même temps elle considérerait l'organisme comme un tout indivisible, inanalysable et absolument spécifique: elle verrait dans l'organisation caractéristique de l'être vivant le vrai facteur de son unité, de ses régulations, de ses restitutions. Mais ce facteur ne serait pas actif, ni, à plus forte raison, transcendant à la manière de la "vis vitalise". Ainsi cette théorie serait "accessible à la science" (L. von Bertalanffy). Elle porte différents noms: organicisme, holisme, théorie de totalité (Ganzheittheorie) etc. Dans certains pays elle est en vogue, dans d'autres elle est en butte à de rudes attaques: elle est considérée comme un "concept vide", comme "un cercle vicieux" (H. Ruyer). Nous croyons que ce reproche n'est pas sans fondement. En effet, nous ne comprenons pas comment les fonctions vitales s'expliqueraient entièrement par les facteurs totalement soumis aux lois physico-chimiques. Car enfin le fait que les éléments physiques et chimiques de l'organisme sont unis entre eux par des liens de "mutuelle interaction" (L. von Bertalanffy) en vue de former un "système" , une "totalité" (Ganzheit) ne change pas leur nature foncière ni, par conséquent, leurs actions. Pour procéder logiquement, cette théorie devrait accepter le "préformisme" (qu'elle rejette). De plus, elle est incapable d'expliquer l'origine et la nature de la "totalité" . Poussée à fond, elle aboutit à une impasse ou à une contradiction. Passons à l' hylémorphisme aristotélicien. On le confond souvent avec le Vitalisme. Il est à regretter que Driesch n'eût pas inventé un autre nom pour désigner la "vis vitalis". Car "l'entélechie" chez Aristote signifie une tout autre chose. D'abord elle ne "réside" pas dans l'organisme; j'entends dire, elle ne réside pas dans l'organisme tout fait. Car c'est elle précisément qui le construit. Mais elle ne le construit pas du dehors, mais du dedans; en s'unissant à de la matière elle lui donne une "forme" particulière d'être vivant. La forme en question n'est point synonyme des contours extérieurs. Elle apporte à la matière une transformation profonde comparable au changement que subit l'hydrogène quand l'oxygène s'unit à lui en proportion de 2: 1. L'organisme qui doit son origine à l'union de la matière et de la forme possèdet des propriétés qui ne se trouvent identiques dans aucune des parties composantes. L'action que l'entéléchie exerce sur l'organisme n'est point comparable à l'action du "pilote qui gouverne son navire" (Aristote); elle n'est pas d'ordre de causalité efficiente (motrice) mais formelle. En se communiquant à la matière, elle lui détermine sa nature; elle lui indique son comportement spécifique, sa manière d'agir. Aucun organe n'agit à son propre titre, ni, par conséquent, pour son propre bien: chacun agit au titre de la "totallité" , et au profit de celle-ci. Voilà em même temps le sens profond de la finalité dans le système d'Aristote et de l'action immcmente. C'est grâce è l'entéléchie que l'organisme possède une structure supérieure è celle que nous rencontrons dans le monde inorganique. Ce dernier point ne doit pas nous créer trop de difficulté. Les biologues parlent communément de la "hiérarchie" dans la Nature, de la "gradation" dans ses créations, des différents "niveaux" de la perfection. On sait combien les partisans de la Ganzheittheorie insistent sur ce point (L. von Bertalanffy). Comme théorie philosophique l'hylémorphisme aristotélicien fait certainement bonne figure permi les théories que les modernes ont inventées pour expliquer "philosophiquement" l'organisme. A notre sens il les surpasse toutes, comme nous avons tâché de le montrer dans plusieurs de nos ouvrages sur le système d'Aristote.

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