Abstract

Cet article revient sur la question du rôle de l’esprit dans la pensée de Heidegger pendant les trois grandes étapes de son développement. Au lieu de nous limiter à une approche purement lexicographique du problème, nous entendons montrer qu’il y a chez Heidegger un lien étroit entre le problème de l’esprit et la forme linguistique de la tautologie. Celle-ci est d’abord utilisée dans être et temps pour articuler la structure de la temporalité originaire contre les conceptions idéalistes de l’esprit comme identité. Nous montrerons ensuite que, pendant les années 1930, l’usage explicite par Heidegger du registre du Geist constitue une réponse à l’usage contemporain, aussi répandu que diversifié, de cette notion. Concernant le Heidegger des années 1950, notre travail vise à mettre en lumière la proximité entre son usage massif de la tautologie par rapport à l’essence du langage et l’histoire de la traduction, dans le courant de la tradition mystique et littéraire allemande, d’un verset de l’Évangile de Jean qui parle de l’esprit dans une formule également tautologique.The present article deals with the role of spirit during the three main periods of Heidegger’s philosophy. Beyond a purely lexicographical approach, our analyses intend to show that in Heidegger’s thought the question of spirit is inseparably tied up with the linguistic form of tautology. In Being and time, tautology appears as the linguistic articulation proper to original temporality as opposed to the idealistic conceptions of spirit as identity. In a second step, we will demonstrate that, during the nineteen thirties, Heidegger’s conception of spirit is to be read as an answer to the ambiguous use of this notion in contemporary philosophical and literary discourse. In the third and last section, we will elaborate the analogy between the later Heidegger’s use of tautology with regard to the essence of language and the history of the translation, inside the German mystical and literary tradition, of a verse of the Gospel of Saint John where the nature of spirit is equally expressed in a tautological formula