Clio 52:93-117 (
2020)
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Abstract
Le crime de viol conjugal, très récemment incriminé par le droit français, n’existe pas sous l’Ancien Régime. La sexualité conjugale est définie par le droit canon et séculier comme un sacrement dont la validité repose sur le principe de l’échange d’un consentement libre. La consommation nuptiale vient confirmer ce consentement initial et ratifie le mariage mais elle impose également aux époux le devoir conjugal. Ainsi, le consentement sexuel inaugural prévaut pour l’ensemble de la vie maritale, empêchant en théorie toute évocation de viol conjugal. L’absence d’incrimination spécifique des violences sexuelles entre époux n’empêche pourtant pas leur poursuite judiciaire par des voies détournées. Par la mobilisation d’un corpus d’affaires matrimoniales variées entre 1600 et 1750 (requêtes de séparation d’habitation, de nullité de mariage pour impuissance sexuelle ou de mariage forcé), cette enquête permet d’accéder à de rares témoignages et expériences féminines de ces violences, de mieux comprendre ce qui était considéré comme violent dans la sexualité conjugale et de réfléchir à ce que ces comportements et leur répression disent de l’ordre de genre patriarcal.