Abstract
De nombreux érudits croient que Bentham envisageait davantage que la simple séparation des sphères religieuse et politique dans la vie sociale. Ils considèrent non seulement que Bentham exigeait la rupture de tout lien entre l’Église et l’État, mais aussi qu’il envisageait une Utopie de « Société laïque utilitariste » dans laquelle les individus pussent être émancipés de la religion. Toutefois, cette interprétation semble confondre sa critique de l’Église d’Angleterre avec un rejet général de la religion en soi. S’il est vrai qu’il considérait la religion établie comme une source fondamentale de l’influence corruptrice sur le bonheur temporel, Bentham ne pensait toutefois pas que toutes les églises étaient nécessairement pernicieuses. En effet, il avait une très grande estime pour les « sectes » volontaires qu’il considérait comme des formes de la « religion de Jésus ». La présente étude se propose d’examiner la conception de la « tolérance » dans la pensée religieuse de Bentham. Elle démontrera donc deux points : premièrement, que Bentham reconnaissait l’utilité inhérente de la religion, et deuxièmement, qu’il considérait la séparation de l’Église et de l’État comme une condition institutionnelle pour réaliser l’utilité de la religion.