Abstract
Cet article se propose d'explorer les différentes facettes de l'éthique stoïcienne du sentiment amoureux. A travers des analyses successives des acceptions stoïques de l'amor amicitiae, de l'eros, de la philanthropia, de l'oikeïosis et de la philia, envisagées dans leur rapport au logos, à la vertu et à la volonté humaine, l'auteur vise à mettre au jour un certain nombre de paradoxes: dans une vaste entreprise qui vise à rationaliser à l'extrême le sentiment amoureux, les stoïciens n'ont-ils pas méconnu l'essence même de l'amour? Ainsi, en multipliant les intermédiaires entre amour et amitié (amor amicitiae), en démythifiant l'acte amoureux, en ne le réservant qu'au sage seul, le stoïcisme semble ignorer l'amour-affection et lui préferer celui, tout rationnel, qui unit, par devoir, le genre humain (philanthropia) en un Tout cosmique. Dès lors, que reste-t-il à l'affection ainsi confrontée au logos? C'est cette dénaturation que le présent article souhaite mettre en lumière. The purpose of this article is to explore stoïcism's various ways of ethically defining the feeling of love (from love itself to friendship). Through several analyses of the stoïc positions on amor amicitiae, eros, philanthopia, oikeïosis and philia, and their relation to logos, human will and virtue, the author's aim is to reveal some paradoxes: with a strong will to rationalise the feeling of love to its extreme, did stoïcism really understand love's essence and nature? In fact, is there any place for fondness, for caring, in its system of philanthropia and human cosmos, ruled by a powerful logos? Are affection, fondness and caring compatible with such a logos? This article studies how stoïcism failed to comprehend and legitimately integrate the feeling of love in its philosophy…