L'esthétique théologique comme esthétique fondamentale chez Hans Urs von Balthasar

Recherches de Science Religieuse 85 (4):557-588 (1997)
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Abstract

Balthasar a acquis la réputation d'un théologien de la Beauté du divin. C'est en phénoménologue qu'il conçoit l'expérience esthétique : comment réussit-il à en faire le fondement d'une théologie esthétique ? « Dieu par lui-rnême a pris une figure » : telle est l'expression centrale de cette esthétique. Elle est influencée au plan théologique par la conception de la Révélation chez Karl Barth : le croire est corrélatif au voir ; et d'autre part au plan philosophique, par le concept de phénomène chez Martin Heidegger : le phénomène est ce qui se montre soi-même par soi-même. L'Écriture est traitée comme une figure, une image phénoménale, dont la médiation se poursuit dans l'Église pour désigner et attester la figure singulière de révélation qu'est le Christ. La difficulté de l'entreprise est de mettre en œuvre une médiation qui n'aboutisse pas à identifier figure du monde et figure de révélation, mais qui n'empêche pas non plus la manifestation de l'être divin en son apparaître sensible, car le mystère de la beauté consiste dans une telle donation de soi-même. Sur ce terrain, Balthasar prend congé d'Augustin et entre en débat avec Karl Rahner. Mais, dans la chair du Christ, Dieu se dévoile en se voilant suprêmement. La figure accède à sa vérité au prix d'une auto-dissimulation. La chair du Christ doit-elle parvenir à ce degré d'idéalité, finalement se « déhistoriser », pour laisser transparaître la vérité de l'Être qui s'offre en elle à notre perception sensible ? C'est la limite paradoxale d'une esthétique fondamentale qui paraît plus propre à inspirer une attitude confessante qu'à se définir conceptuellement.Balthasar acquired the reputation of a theologian of divine Beauty. It was as a phenomenologist that he conceived the aesthetic experience : how did he succeed in founding an aesthetic theology ? « God, of his own doing, took a countenance » : such is the main expression of this aesthetic. It is influenced on a theological level by the conception of Karl Barth’s Revelation : Believing is correlative to seeing ; and on the philosophical level, by the concept of phenomenon with Martin Heiddegger : the phenomenon is that which shows itself by itself. Writing is treated as a figure, a phenomenal image, of which the mediation is continued in the Church to designate and attest the unique figure of revelation, which is Christ. The problem with the undertaking is to put into effect a mediation that does not conclude in identifying the figure of the world and the figure of revelation. It does not prohibit the manifestation of the divine being in its sensitive apparition, for the mystery of beauty consists in the giving of oneself. In this light, Balthasar leaves Augustine and enters into discussion with Karl Rahner. In the flesh of Christ, however, God unveils himself by completely hiding himself. The figure approaches its truth at the price of a self-concealment. Must the flesh of Christ come to such a degree of idealization, finally to de-historicize itself, in order to allow the truth of Being to shine through, a truth that offers itself through that flesh to our sensitive perception ? This is the paradoxical limit of a fundamental aesthetic that seems to be more proper to inspire a confessing attitude than to define itself conceptually

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