Abstract
Les thèses, proposées par M. Krämer, dans son ouvrage Arete bei Platon und Aristoteles, marqueraient une révolution dans les études platoniciennes, si elles étaient acceptables. Selon lui, Platon a, dès le commencement de sa carrière philosophique, au moins dès l'ouverture de l'Académie, possédé un système élaboré d'ontologie. Ce système a été exposé aux membres de l'Académie, sous forme d'une doctrine ésotêrique. Les dialogues, qui sont entièrement des œuvres protreptiques, ne comportent que des allusions à cette doctrine; tout de même, sans connaître ce fonds doctrinal, on ne peut vraiment comprendre les dialogues. Sans vouloir dresser un compte-rendu complet du livre en question, l'auteur du présent article voulait écrire quelques notes marginales. Ni le récit d'Aristoxène, ni les données plus tardives n'autorisent M. Kr. à déclarer que la fameuse conférence πεϱ τἀγαϑοῦ ait constitué une série de cours. En outre, le récit même n'est pas exempt d'invraisemblance, si l'on compare les fragments des poètes de la comédie moyenne. La dépréciation de l'œuvre écrite que contient la fin du Phèdre n'est pas absolue, comme le croît M. Krämer, mais relative. Dans la vue de M. Kr., il est difficile de comprendre pourquoi Platon a écrit. Surtout la composition des Lois est inexplicable. Dans la théorie d'un système ésotérique, l'héritage de Socrate ne reste plus reconnaissable. Si, comme dans les théories de M. Krämer, l'axiologie se confond avec l'ontologie, l'autonomie de la décision éthique disparaît, et la position priviligiée du Bien ne peut plus être comprise. Le refus de tout développement chez Platon contraint M. Krämer à donner des interprétations très forcées de plusieurs textes platoniciens